1. Le Ragondin, l’indésirable familier
Bien connu des promeneurs, le ragondin () ne cesse d’étendre son territoire. Originaire d’Amérique du Sud, importé en France à la fin du XIXe siècle pour la fourrure, il s’est rapidement échappé des élevages. Présent dans l’estuaire depuis les années 1950, il est aujourd'hui omniprésent sur les berges, fossés, marais.
- Impact sur les berges : Le ragondin creuse de profondes galeries qui fragilisent les digues, les chemins et les installations hydrauliques. Sur l’ensemble de la Nouvelle-Aquitaine, les dégâts sont estimés à des centaines de milliers d’euros par an (source : Conseil Départemental de Gironde).
- Compétition écologique : Leur appétit vorace accélère la disparition des plantes rivulaires, affaiblissant les écosystèmes pour les espèces autochtones comme le campagnol amphibie ou certaines espèces d’oiseaux nicheurs.
- Santé publique : Vecteur potentiel de la leptospirose, maladie bactérienne grave transmise par l’urine.
Pour tenter de contenir la prolifération, une campagne de piégeage et de sensibilisation s’organise chaque année en Gironde, mobilisant chasseurs et collectivités.
2. La renouée du Japon, le végétal qui étouffe tout
Sous ses airs de bambou gracile, Reynoutria japonica, ou renouée du Japon, tapisse les digues, les bords de routes et les talus du fleuve. Introduite comme plante d’ornement au XIXe siècle, elle gagne du terrain à chaque crue, emportée par l’eau et les engins de chantier.
- Colonisation rapide : Capable d’atteindre 3 à 4 mètres de haut, la renouée double la surface qu’elle occupe chaque année là où elle s’installe (source : OFB).
- Impact sur la flore locale : Sa croissance souterraine (et ses rhizomes traçants) laisse peu de chances aux espèces fragiles du rivage : salicaires, iris et scirpes reculent.
- Problèmes pour l’homme : Elle accélère l’érosion, déstabilise les ouvrages fluviaux, perturbe la gestion des réseaux de voirie et peut empêcher l’accès aux berges pour les pêcheurs et promeneurs.
Arracher la renouée confine à l’utopie : chaque fragment de racine peut donner naissance à une nouvelle plante. Sur la Gironde, des projets pilotes d’utilisation de bâches occultantes et de fauche régulière sont testés, notamment autour de Pauillac et Blaye.
3. La jussie, la fleur jaune qui colonise l’eau
La jussie, qui regroupe deux espèces originaires d’Amérique du Sud ( et ), a colonisé les bras morts, lagunes, fossés, parties calmes de l’estuaire. Sa croissance explosive recouvre la surface de l’eau d’épais tapis verts et jaunes.
- Effondrement de la biodiversité aquatique : En privant poissons et invertébrés d’oxygène, la jussie asphyxie la vie dans les petits canaux et sections calmes.
- Multiplication exponentielle : Une seule tige emportée peut donner, l’année suivante, plus de 100 nouveaux pieds sur plusieurs dizaines de mètres (données : Fédération Loire-Atlantique pour la pêche et la protection du milieu aquatique).
- Impacts socio-économiques : Elle gêne la navigation de loisir, la pêche, colmate les grilles des réseaux d’irrigation et majore les coûts de gestion des espaces naturels.
4. Le silure glane, le géant qui redistribue les cartes
Le silure glane (), longtemps considéré comme fabuleux ou anodin, se fait de plus en plus remarquer. Introduit volontairement pour la pêche sportive, ce poisson massif (plus de 2,50 m possible, 130 kg rapporté) s’est installé dans la Garonne et la Dordogne et remonte volontiers dans l’estuaire de la Gironde.
- Impact sur la faune piscicole : Sur certaines portions, les observations montrent qu’il représente jusqu’à 20 % de la biomasse de poissons de grande taille (source : INRAE), prédateur de sandres, carpes, anguilles, mais aussi d’oiseaux et mammifères aquatiques juvéniles.
- Sensibilité des migrateurs : Certaines études craignent un impact sur la reproduction de l’esturgeon européen et ses cousins menacés, déjà éprouvés par la pêche et la fragmentation des cours d’eau.
Les débats persistent sur l’urgence de réguler la population de silures, entre arguments écologiques et intérêts des pêcheurs sportifs, qui affluent sur le site précisément pour sa présence.
5. Le frelon asiatique, nouveau prédateur du ciel
Le frelon à pattes jaunes (), appelé communément frelon asiatique, est arrivé en France par le port de Bordeaux vers 2004 dans des poteries chinoises. Rapidement, il s’est répandu dans toutes les communes autour de l’estuaire.
- Danger pour les pollinisateurs : Il décime les colonies d’abeilles, essentielles à la pollinisation des vignes et vergers de l’estuaire.
- Effet domino sur la chaîne alimentaire : Moins d’abeilles, moins de pollinisation, donc moins de fruits, de graines, de biodiversité. Plusieurs études font état d’une baisse de 20 % de la productivité de certains apiculteurs locaux entre 2010 et 2020 (Ministère de l’Agriculture).
- Difficultés d'éradication : Les nids, souvent haut perchés dans les arbres riverains ou sur les falaises, sont difficiles à repérer et à détruire.
Chaque printemps renoue la mobilisation contre cet envahisseur, entre destruction des nids et pièges sélectifs, mais le combat reste inégal et le frelon poursuit sa progression.